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Plaidoyer Pour La Maitrise De L’espace En République Démocratique Du Congo

Atlas de l’organisation administrative de la République démocratique du Congo

Par Léon de Saint Moulin S.J. avec la collaboration de Jean-Luc Kalombo Tshibanda
Centre d’études pour l’action sociale, Kinshasa
2ème édition revue et amplifiée, 2011, 256 pages, 30$
 
La République démocratique du Congo (RDC) a réalisé, en novembre 2011, les deuxièmes élections couplées, présidentielle et législatives. Le processus a été émaillé de plusieurs failles qui ont donné lieu à des résultats de plus en plus controversés. L’une des leçons tirées de cette situation est que la RDC constitue un espace très vaste à maîtriser préalablement. En lançant cet Atlas de l’organisation administrative, Léon de Saint Moulin[i] apporte un instrument fondamental de travail capable d’aider les décideurs politiques et autres acteurs nationaux à organiser demain des élections crédibles et transparentes.
 
Cette publication a été réalisée sous le patronage de la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI) et du Ministère de la Recherche Scientifique. Son impression a bénéficié du financement de MISEREOR, une œuvre de l’Église catholique d’Allemagne chargée du Développement. Les données relatives aux collectivités et aux groupements ont été mises au point avec le concours du Ministère de l’Intérieur, Sécurité,
Décentralisation et Aménagement du Territoire et de l’Institut National de la Statistique (INS). Le rôle des multiples informateurs (agents administratifs ou pastoraux, hommes politiques, enseignants et étudiants) a été souligné dans la confection de ces cartes.
 
L’ouvrage comporte trois grandes parties. La première, très brève, est consacrée à l’histoire et à la répartition de la population. La deuxième porte sur les cartes des territoires et des villes. La dernière concerne la formation et les perspectives d’aménagement du territoire. La livraison se termine par un index des entités administratives et de certaines localités figurant sur les cartes.
La RDC, une trame administrative complexe
La RDC comprend 11 provinces, mais la Constitution du 18 février 2006 a prévu, en son article 2, la subdivision du pays en 26 entités décentralisées. L’entrée en vigueur de cette disposition tarde encore pour des raisons techniques.
 
Actuellement, la RDC compte 21 villes, dont la capitale, Kinshasa, subdivisées en communes. Les communes sont réparties en quartiers. Celles-là sont de simples subdivisions administratives. Il y a 145 Territoires, subdivisés en secteurs ou chefferies et en communes hors villes. Il y a 472 secteurs et 261 chefferies, soit au total 733 entités territoriales décentralisées (ETD), dotées de la personnalité juridique et d’un conseil élu. Géographiquement, les chefferies sont moins nombreuses à l’Ouest de la RDC, mais majoritaires dans les provinces de l’Est. De façon spécifique, l’Ouest compte 349 secteurs et 23 chefferies, tandis qu’à l’Est, il y a 127 secteurs contre 237 chefferies. A leur tour, les secteurs et chefferies sont scindés en (5675) groupements qui sont considérés comme des institutions axées sur la coutume. En RDC, les institutions coutumières demeurent importantes et jouent un rôle incontestable « dans la vie des communautés villageoises. La Constitution reconnaît l’autorité et la propriété coutumières ». L’article 207 stipule que « l’autorité coutumière est reconnue. Elle est dévolue conformément à la coutume locale, pour autant que celle-ci ne soit pas contraire à la Constitution, à la loi, à l’ordre public et aux bonnes mœurs (…) L’autorité coutumière a le devoir de promouvoir l’unité et la cohésion nationales ». Quant à la propriété, l’article 34 souligne que « l’État garantit le droit à la   propriété individuelle ou collective, acquis conformément à la loi ou à la coutume » : Il faut cependant remarquer que « les normes de la garantie des droits fonciers coutumiers n’ont pas été déterminées et les autorités des entités décentralisées sont placées sous une tutelle étroite des représentants du pouvoir central, qui accorde des concessions diverses d’exploitation de terres coutumières » (p. 9).
L’Atlas : une mine à découvrir et à (re)visiter
Le lecteur pourra trouver dans cet outil une série de cartes d’ensemble, d’abord, une carte administrative (p. 8), ensuite la carte de la densité de la population rurale en 1984 et 2010 (pp. 20-21), suivie de la carte des villes en 1960 et en 2010 (pp. 24 – 25), celle de la formation des frontières (p. 213), la carte des groupes linguistiques (p. 215), la carte de la répartition du PIB par région (p. 217) et enfin une proposition des routes prioritaires en fonction des crêtes du peuplement (p. 219).
 
La deuxième partie contient les cartes des territoires et des villes. Chaque province y est représentée par chacune des cartes de ses territoires comportant les limites des secteurs et chefferies et, dans la mesure du possible, des groupements. Ces limites figurent sur les cartes du territoire au 1/200.000 de l’Institut Géographique du Congo.
 
Il est à noter que la graphie des noms est celle des langues locales dans la mesure où il n’existe pas un usage officiel consacré. En Province Orientale et au Maniema, « il n’est pas rare que la dénomination d’un groupement change avec l’arrivée d’un nouveau chef du groupement !».
 
Un coup d’œil sur l’histoire de la population nous fixe sur les failles concernant l’évolution de cette population. L’une d’elles porte sur l’absence de recensements périodiques. Depuis le recensement scientifique du
1er juillet 1984, rien d’autre n’a été réalisé. Certes des enquêtes ont été entreprises avant l’indépendance. En dépit de cela, la nécessité de recensements s’impose pour favoriser des consultations véritablement crédibles. Sur la base du mouvement observé, il est fort probable que la population de la RDC puisse atteindre 100 millions d’habitants en 2023 !
 
Le réseau urbain connaît un net changement entre la situation de 1960 et celle de 2010. La configuration de 1960 est loin de ressembler à celle d’aujourd’hui. En effet, alors qu’auparavant l’urbanisation plus forte suivait l’axe du Sud-Ouest ou la voie nationale par lequel passait l’exportation des produits miniers du Katanga par le port de Matadi, le développement des villes demeure indéniable : Kinshasa compte 10 millions d’habitants, Lubumbashi et Mbuji-Mayi ont chacune 1,5 million d’habitants ; Kananga (ex- Luluabourg) et Kisangani (ex-Stanley ville) comptent chacune 800.000 habitants, Kolwezi et Bukavu se situent à 500.000 habitants. On retrouve 18 autres villes qui totalisent chacune plus de 200.000 habitants. Ces centres urbains demeurent des « points de polarisation de l’espace, des centres d’éducation et des foyers de culture ».
 
Il y a deux axes principaux de la population. Le premier se situe au Sud et il date déjà de l’époque coloniale : il va de l’Océan Atlantique jusqu’au Kasai. La population atteint 26,4 millions d’habitants et une densité moyenne de 84 habitants au km². Le second axe se localise à l’Est, du Lac Tanganyika à la frontière du Soudan.
 
Cet Atlas constitue un instrument de travail utile pour les hommes de terrain, les décideurs politiques et les chercheurs. Il apporte une connaissance approfondie de la RDC grâce aux différentes cartes. C’est aussi un outil intéressant d’éducation civique car il renseigne de façon spécifique sur les dénominations des localités. Ce que la plupart de jeunes congolais semblent ignorer ou identifient de façon erronée.

notes

[1] L. de Saint Moulin est un prêtre de la Compagnie de Jésus. C’est un historien démographe qui a enseigné à l’Université Lovanium de Kinshasa et à l’Université Nationale du Zaïre/Campus de Lubumbashi, ainsi qu’à l’Université Catholique du Congo. Il est membre du CEPAS.

Auteur

Noël OBOTELLA RASHIDI

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Pages  22-23

Africa Review of Books / Revue Africaine des Livres

Volume 08 N° 02,​ Septembre 2012

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