Les femmes Africaines à l’épreuve du développement
Par Nouria Benghabrit- Remaoun & Belkacem Benzenine (coord.),
Editions CRASC, Oran, 2012, 306 pages
ISBN : 978 – 9961 – 813 – 44 – 7, 800 DA
Editions CRASC, Oran, 2012, 306 pages
ISBN : 978 – 9961 – 813 – 44 – 7, 800 DA
A la mémoire de Fatima Zohra Saï (1947-2012)
Introduction
Cet ouvrage, par sa structure, renvoie à la volonté de ses coordonnateurs (trices) et de donner une vision à la triple dimension des défis[i]des femmes africaines face à des contextes et des situations complexes, pluriels et divers au vu des facteurs socioculturels, économiques et politiques qui façonnent leur continent.
Si la présentation et le plan des contributions de l’ouvrage semblent concerner des domaines, des thèmes et des territoires bien précis, il y va de la nature transversale de l’approche genre. Chaque contribution, quel que soit l’axe engagé, aborde de manière directe ou indirecte d’autres éléments déjà approchés et/ou amorcés par d’autres contributeurs (trices), suivant des angles d’attaque qui feraient la différence et l’originalité des un-e-s par rapport aux autres. Ainsi, les contributeurs (trices) empruntent l’approche genre pour rendre compte des réalités individuelles et collectives des femmes africaines et rendre visible ce que d’autres ont laissé ou plongé d’elles dans l’ombre comme dynamiques et projections stratégiques.
Dans cette perspective genre, nous abordons dans un premier point les Africaines dans leurs rapports à la sphère politique, à la citoyenneté et à l’Etat ; et dans un second point celle de leur position et le positionnement des savoirs, de l’éducation et de la formation ; et enfin le tourbillon dans lequel est prise l’approche de leur travail entre le statut du travail / l’emploi, les questions de la mobilité, de la parité, celle de gouvernance et de l’accompagnement.
Si la présentation et le plan des contributions de l’ouvrage semblent concerner des domaines, des thèmes et des territoires bien précis, il y va de la nature transversale de l’approche genre. Chaque contribution, quel que soit l’axe engagé, aborde de manière directe ou indirecte d’autres éléments déjà approchés et/ou amorcés par d’autres contributeurs (trices), suivant des angles d’attaque qui feraient la différence et l’originalité des un-e-s par rapport aux autres. Ainsi, les contributeurs (trices) empruntent l’approche genre pour rendre compte des réalités individuelles et collectives des femmes africaines et rendre visible ce que d’autres ont laissé ou plongé d’elles dans l’ombre comme dynamiques et projections stratégiques.
Dans cette perspective genre, nous abordons dans un premier point les Africaines dans leurs rapports à la sphère politique, à la citoyenneté et à l’Etat ; et dans un second point celle de leur position et le positionnement des savoirs, de l’éducation et de la formation ; et enfin le tourbillon dans lequel est prise l’approche de leur travail entre le statut du travail / l’emploi, les questions de la mobilité, de la parité, celle de gouvernance et de l’accompagnement.
Les Africaines, la sphère politique, la citoyenneté et l’Etat
La question du rapport des femmes africaines au politique, à l’acquisition et à l’exercice de pouvoirs, est abordée dans l’optique de rendre visibles les obstacles qui se posent aux femmes et/ou aux organisations gouvernementales ou non gouvernementales dans des domaines divers.
Les sept contributions, sous le titre générique de « Femmes, institutions et mouvements associatifs», viennent de cette idée révélatrice de dynamiques et perspectives des femmes africaines. Certaines de ces contributrices interrogent et traitent des données statistiques au niveau d’un ensemble de pays africains, deux autres s’appuient sur des situations régionales comme le Maghreb et l’Afrique de l’Ouest alors que les autres contributrices illustrent leurs propos à travers des approches par pays. Et c’est en particulier le cas de l’expérience algérienne que des auteurs mettent en exemple pour rendre visible des avancées, mais surtout des entraves à la promotion des femmes en Afrique.
La contribution de Fatou Sarr sur les politiques publiques et celle de Fatima Zohra Saï sur la participation politique des femmes, apportent des éclairages sur les écarts observés entre les discours politiques et des politiques, les réalisations des politiques publiques en matière de promotion féminine et les attentes des femmes en Afrique. Alors que l’auscultation par Fatou Sarr des statistiques, à travers des indicateurs tels que l’indice sexo spécifique du développement humain (IDSH), dans des secteurs-clés au niveau politique, social et économique, laisse apparaître des disparités de genre et des limites des mécanismes des politiques publiques, en lien avec les pratiques patriarcales au titre d’obstacles, pour traduire les engagements des Etats africains en faveur d’une promotion réelle des femmes, notamment dans quinze pays[ii]. Les interrogations des statistiques sur la participation des femmes aux instances politiques et autres sphères de décision formulées par Fatima Zohra Saï est, au sens de son auteure, « une réflexion sur, des pistes susceptibles d’être empruntées pour mener des travaux en la matière dans une perspective comparative ».
Par ailleurs, Dalila Iamarène Djerbal, par la question des violences contre les femmes, place au centre du développement de la société la question de la citoyenneté. Cette auteure explique que les violences faites aux femmes expriment la négation de leur apport à la société et s’érige, par la sorte, comme obstacle au développement de la citoyenneté. Les violences, dans toutes leurs formes, fragilisent ainsi les femmes dans leur participation à la vie économique et aux diverses activités citoyennes. Les conflits politiques ou armés qui secouent des pays comme l’Algérie, le Congo, le Soudan et le Liberia aggravent encore plus l’accès à la citoyenneté et exposent plus les femmes à certaines formes de violences comme les formes effroyables de migration, de viol et d’esclavage sexuel. L’auteure indique que la mise à nu et la dénonciation de ces violences doivent être une première étape. Une seconde étape est nécessaire, celle de « la mise en place des instruments et des actions pour la reconnaissance de la place des femmes aussi bien sur le plan familial que public ».
Fatou Sow, quant à elle, propose une entrée par ce que présente et représente le corps des femmes comme enjeu au cœur du politique et des inégalités de sexe et des disparités de classe et de race. Mesurer les avancées des droits des femmes vers la citoyenneté et l’égalité et faire entendre leurs voix « enrichies des analyses » de leurs conditions et de leurs « priorités d’Africaines, de femmes du Sud, appartenant au monde en développement » sont la voie empruntée par l’auteure dans sa réflexion sur les femmes en politique et leurs pratiques de la politique. Cette approche est, pour son auteure, l’« outil qui transforme les mirages en réalités ». Dans cette perspective, elle puise ses exemples dans la situation des pays de l’Afrique de l’Ouest.
Alors que Fatima Zohra Guechi, pour livrer une réflexion sur la construction de l’Etat et les droits des femmes au Maghreb, entreprend une démarche originale sur « la valorisation des savoirs produits par des femmes »[iii]à travers une analyse critique de la production scientifique de Mounira M. Charrad[iv] dont une des questions centrales est « pourquoi la Tunisie, l’Algérie et le Maroc ont-ils engagé ou freiné des réformes qui s’imposent à la lumière des similitudes culturelles, religieuses et autour des relations de genre et de la structure du patriarcat ? ». Ce travail a pour hypothèse que « les lois sur la famille sont une résultante du processus de la formation de l’Etat dans chaque pays. Que plus les victorieux du nationalisme ont des liens étroits et serrés avec des groupes agnatiques (patriarcat), moins les perspectives de réformes de la famille sont indépendantes ».
Fatma Oussedik, pour sa part, structure sa réflexion sur les femmes en Afrique autour de deux notions fondamentales, en l’occurrence la notion de post-colonie et l’analyse des rapports de genre. Ainsi, elle met en exergue l’ambivalence dans les sociétés africaines entre un continent en « mutation rapide », une présence de plus en plus importante des femmes dans les rues, au travail et dans les universités et ce selon des logiques patriarcales des pouvoirs politiques qui tirent ces sociétés vers le bas et «produisent des textes juridiques hybrides». L’auteure consacre l’essentiel de sa réflexion aux enjeux politiques pour la société algérienne dans son ensemble au travers des ratés des institutionnalisations entreprises en Algérie au niveau des institutions scolaires et judiciaires et de l’occultation d’une mutation sociale par la naissance du sujet.
Par ailleurs, Ghania Graba sort des sentiers battus en matière « de lutte pour l’égalité juridique et contre les lois discriminatoires » qui se focalisent sur les législations en termes de statuts personnels ou de code de la famille. L’auteure aborde le droit social au sens du droit du travail et de la sécurité sociale du point de vue du genre. Il s’agit donc pour l’auteure d’interroger et de comprendre les constructions faites sur « la base de différenciation sexuelle » et comment le droit a superposé, dans la durée, au gré des réformes, la sanction normative des inégalités sociales et de la fiction de sa neutralité objective ».
Les sept contributions, sous le titre générique de « Femmes, institutions et mouvements associatifs», viennent de cette idée révélatrice de dynamiques et perspectives des femmes africaines. Certaines de ces contributrices interrogent et traitent des données statistiques au niveau d’un ensemble de pays africains, deux autres s’appuient sur des situations régionales comme le Maghreb et l’Afrique de l’Ouest alors que les autres contributrices illustrent leurs propos à travers des approches par pays. Et c’est en particulier le cas de l’expérience algérienne que des auteurs mettent en exemple pour rendre visible des avancées, mais surtout des entraves à la promotion des femmes en Afrique.
La contribution de Fatou Sarr sur les politiques publiques et celle de Fatima Zohra Saï sur la participation politique des femmes, apportent des éclairages sur les écarts observés entre les discours politiques et des politiques, les réalisations des politiques publiques en matière de promotion féminine et les attentes des femmes en Afrique. Alors que l’auscultation par Fatou Sarr des statistiques, à travers des indicateurs tels que l’indice sexo spécifique du développement humain (IDSH), dans des secteurs-clés au niveau politique, social et économique, laisse apparaître des disparités de genre et des limites des mécanismes des politiques publiques, en lien avec les pratiques patriarcales au titre d’obstacles, pour traduire les engagements des Etats africains en faveur d’une promotion réelle des femmes, notamment dans quinze pays[ii]. Les interrogations des statistiques sur la participation des femmes aux instances politiques et autres sphères de décision formulées par Fatima Zohra Saï est, au sens de son auteure, « une réflexion sur, des pistes susceptibles d’être empruntées pour mener des travaux en la matière dans une perspective comparative ».
Par ailleurs, Dalila Iamarène Djerbal, par la question des violences contre les femmes, place au centre du développement de la société la question de la citoyenneté. Cette auteure explique que les violences faites aux femmes expriment la négation de leur apport à la société et s’érige, par la sorte, comme obstacle au développement de la citoyenneté. Les violences, dans toutes leurs formes, fragilisent ainsi les femmes dans leur participation à la vie économique et aux diverses activités citoyennes. Les conflits politiques ou armés qui secouent des pays comme l’Algérie, le Congo, le Soudan et le Liberia aggravent encore plus l’accès à la citoyenneté et exposent plus les femmes à certaines formes de violences comme les formes effroyables de migration, de viol et d’esclavage sexuel. L’auteure indique que la mise à nu et la dénonciation de ces violences doivent être une première étape. Une seconde étape est nécessaire, celle de « la mise en place des instruments et des actions pour la reconnaissance de la place des femmes aussi bien sur le plan familial que public ».
Fatou Sow, quant à elle, propose une entrée par ce que présente et représente le corps des femmes comme enjeu au cœur du politique et des inégalités de sexe et des disparités de classe et de race. Mesurer les avancées des droits des femmes vers la citoyenneté et l’égalité et faire entendre leurs voix « enrichies des analyses » de leurs conditions et de leurs « priorités d’Africaines, de femmes du Sud, appartenant au monde en développement » sont la voie empruntée par l’auteure dans sa réflexion sur les femmes en politique et leurs pratiques de la politique. Cette approche est, pour son auteure, l’« outil qui transforme les mirages en réalités ». Dans cette perspective, elle puise ses exemples dans la situation des pays de l’Afrique de l’Ouest.
Alors que Fatima Zohra Guechi, pour livrer une réflexion sur la construction de l’Etat et les droits des femmes au Maghreb, entreprend une démarche originale sur « la valorisation des savoirs produits par des femmes »[iii]à travers une analyse critique de la production scientifique de Mounira M. Charrad[iv] dont une des questions centrales est « pourquoi la Tunisie, l’Algérie et le Maroc ont-ils engagé ou freiné des réformes qui s’imposent à la lumière des similitudes culturelles, religieuses et autour des relations de genre et de la structure du patriarcat ? ». Ce travail a pour hypothèse que « les lois sur la famille sont une résultante du processus de la formation de l’Etat dans chaque pays. Que plus les victorieux du nationalisme ont des liens étroits et serrés avec des groupes agnatiques (patriarcat), moins les perspectives de réformes de la famille sont indépendantes ».
Fatma Oussedik, pour sa part, structure sa réflexion sur les femmes en Afrique autour de deux notions fondamentales, en l’occurrence la notion de post-colonie et l’analyse des rapports de genre. Ainsi, elle met en exergue l’ambivalence dans les sociétés africaines entre un continent en « mutation rapide », une présence de plus en plus importante des femmes dans les rues, au travail et dans les universités et ce selon des logiques patriarcales des pouvoirs politiques qui tirent ces sociétés vers le bas et «produisent des textes juridiques hybrides». L’auteure consacre l’essentiel de sa réflexion aux enjeux politiques pour la société algérienne dans son ensemble au travers des ratés des institutionnalisations entreprises en Algérie au niveau des institutions scolaires et judiciaires et de l’occultation d’une mutation sociale par la naissance du sujet.
Par ailleurs, Ghania Graba sort des sentiers battus en matière « de lutte pour l’égalité juridique et contre les lois discriminatoires » qui se focalisent sur les législations en termes de statuts personnels ou de code de la famille. L’auteure aborde le droit social au sens du droit du travail et de la sécurité sociale du point de vue du genre. Il s’agit donc pour l’auteure d’interroger et de comprendre les constructions faites sur « la base de différenciation sexuelle » et comment le droit a superposé, dans la durée, au gré des réformes, la sanction normative des inégalités sociales et de la fiction de sa neutralité objective ».
Position et positionnement des savoirs, de l’éducation et de la formation en Afrique : une question de genre
L’ouvrage aborde une question centrale dans la réflexion féministe en matière d’« accès à l’écriture, aux outils conceptuels, aux institutions du savoir et à la diffusion de ce dernier qui est en jeu»[v]. Au travers de quatre textes, les trois contributrices et l’unique contributeur s’intéressent à l’accès à l’éducation, à la production des savoirs et aux ressources humaines. Ils partent de leurs appartenances à des organisations gouvernementales ou non gouvernementales, nationales ou internationales, ou de chercheur-e-s.
Odile Ndoumbé Faye fait un état des lieux des disparités dans l’accès des femmes à l’éducation, à la production des savoirs et aux instances de décisions dans l’enseignement en Afrique. L’auteure porte un regard critique sur les obstacles à la participation pleine et entière des femmes africaines au développement par les obstacles à l’égalité hommes/femmes dans l’éducation et l’accès au savoir. Elle propose des solutions inspirées des approches et analyses de l’Association des Femmes Africaines pour la Recherche et le Développement (AFARD). Elle s’attarde sur la nécessité de valoriser le capital humain par l’éducation, le savoir et l’emploi afin de lutter contre la pauvreté. Elle soulève également la question de « l’harmonisation des lois supranationales et des lois nationales pour une effectivité de l’égal accès des hommes et des femmes à l’avoir, au pouvoir et au savoir ».
Sittou Raghadat Mohamed part d’un point de vue et d’une enquête sur le combat pour l’égalité de genre dans le système éducatif en Afrique subsaharienne au sein du «Forum des Educatrices aux Comores» – FAWECOM. L’auteure met le doigt sur le constat que lorsque les filles arrivent à braver les pesanteurs et les obstacles à leur accès et leur maintien dans les systèmes éducatifs, elles prouvent qu’elles sont les plus performantes. Les données avancées par la contributrice montrent que l’égalité des chances entre les deux sexes dans le système éducatif reste à atteindre malgré les efforts déployés depuis l’indépendance par l’Union des Comores. Cependant, l’auteure a la conviction que le combat pour l’égalité de genre et l’engagement dans la transformation des écoles en Centres d’excellence du Forum des éducatrices africaines – FAWE – dont son antenne des Comores – FAWECOM – et l’introduction du programme TUSEME, n’aboutira que par l’habilitation des filles, mais aussi des garçons dès leur jeune âge.
Doria Merabtine défend l’idée que l’amélioration de la situation de la mortalité maternelle constitue un enjeu pour le développement. Elle rappelle que l’Objectif n°5 du Millénaire pour le développement « vise la réduction, entre 1990 et 2015, de trois quarts du taux de mortalité maternelle » et, parce que ce facteur constitue, dans son analyse, un indicateur sur le statut social des femmes, elle s’appuie pour faire un point de situation, sur des données de 2005 dans trois grandes régions d’Afrique (Afrique Ouest/ Centrale ; Afrique de l’Est / Australe et Moyen Orient / Afrique du Nord) comparativement avec le reste du monde. L’auteure note que les lenteurs en matière de réduction de cette mortalité constituent une violation des droits humains et le continent africain est particulièrement interpellé sur cette question.
Alors que les auteures précédentes ont abordé des situations de discriminations des filles et des femmes en matière d’accès aux ressources et aux services publiques, et particulièrement l’accès des filles, Aymen Ben Brahim, quant à lui, nous livre les résultats d’une analyse de genre en matière d’accès des jeunes aux offres d’emploi en Tunisie. L’auteur cherche à comprendre les dynamiques à l’œuvre dans le recrutement comme un moment du processus d’intégration sociale, d’autonomie individuelle et de reconnaissance par autrui. L’auteur nous explique que l’accès des jeunes diplômé -e-s est exposé à une double discrimination au niveau du genre et de l’âge selon le milieu porteur institutionnel (bureaux d’emploi, agences nationales de travail indépendantes, associations de développement) et non institutionnel (famille, secteur informel). Par ailleurs, ces inégalités dans l’accès des jeunes à l’emploi sont le produit «d’identités spécifiques héritées de multiples processus de socialisation ».
Odile Ndoumbé Faye fait un état des lieux des disparités dans l’accès des femmes à l’éducation, à la production des savoirs et aux instances de décisions dans l’enseignement en Afrique. L’auteure porte un regard critique sur les obstacles à la participation pleine et entière des femmes africaines au développement par les obstacles à l’égalité hommes/femmes dans l’éducation et l’accès au savoir. Elle propose des solutions inspirées des approches et analyses de l’Association des Femmes Africaines pour la Recherche et le Développement (AFARD). Elle s’attarde sur la nécessité de valoriser le capital humain par l’éducation, le savoir et l’emploi afin de lutter contre la pauvreté. Elle soulève également la question de « l’harmonisation des lois supranationales et des lois nationales pour une effectivité de l’égal accès des hommes et des femmes à l’avoir, au pouvoir et au savoir ».
Sittou Raghadat Mohamed part d’un point de vue et d’une enquête sur le combat pour l’égalité de genre dans le système éducatif en Afrique subsaharienne au sein du «Forum des Educatrices aux Comores» – FAWECOM. L’auteure met le doigt sur le constat que lorsque les filles arrivent à braver les pesanteurs et les obstacles à leur accès et leur maintien dans les systèmes éducatifs, elles prouvent qu’elles sont les plus performantes. Les données avancées par la contributrice montrent que l’égalité des chances entre les deux sexes dans le système éducatif reste à atteindre malgré les efforts déployés depuis l’indépendance par l’Union des Comores. Cependant, l’auteure a la conviction que le combat pour l’égalité de genre et l’engagement dans la transformation des écoles en Centres d’excellence du Forum des éducatrices africaines – FAWE – dont son antenne des Comores – FAWECOM – et l’introduction du programme TUSEME, n’aboutira que par l’habilitation des filles, mais aussi des garçons dès leur jeune âge.
Doria Merabtine défend l’idée que l’amélioration de la situation de la mortalité maternelle constitue un enjeu pour le développement. Elle rappelle que l’Objectif n°5 du Millénaire pour le développement « vise la réduction, entre 1990 et 2015, de trois quarts du taux de mortalité maternelle » et, parce que ce facteur constitue, dans son analyse, un indicateur sur le statut social des femmes, elle s’appuie pour faire un point de situation, sur des données de 2005 dans trois grandes régions d’Afrique (Afrique Ouest/ Centrale ; Afrique de l’Est / Australe et Moyen Orient / Afrique du Nord) comparativement avec le reste du monde. L’auteure note que les lenteurs en matière de réduction de cette mortalité constituent une violation des droits humains et le continent africain est particulièrement interpellé sur cette question.
Alors que les auteures précédentes ont abordé des situations de discriminations des filles et des femmes en matière d’accès aux ressources et aux services publiques, et particulièrement l’accès des filles, Aymen Ben Brahim, quant à lui, nous livre les résultats d’une analyse de genre en matière d’accès des jeunes aux offres d’emploi en Tunisie. L’auteur cherche à comprendre les dynamiques à l’œuvre dans le recrutement comme un moment du processus d’intégration sociale, d’autonomie individuelle et de reconnaissance par autrui. L’auteur nous explique que l’accès des jeunes diplômé -e-s est exposé à une double discrimination au niveau du genre et de l’âge selon le milieu porteur institutionnel (bureaux d’emploi, agences nationales de travail indépendantes, associations de développement) et non institutionnel (famille, secteur informel). Par ailleurs, ces inégalités dans l’accès des jeunes à l’emploi sont le produit «d’identités spécifiques héritées de multiples processus de socialisation ».
Le statut du travail/l’emploi, les questions de la mobilité, de la parité, de gouvernance et de l’accompagnement
Les six contributions regroupées sous le titre« approches du genre en Afrique : la théorie et les pratiques de terrain » abordent en réalité la question du travail et de l’emploi, aussi bien sur le plan théorique que pratique dans des optiques institutionnelles et non institutionnelles. Et c’est le seul axe où existe une égalité de genre parmi les auteur-e –s, ce qui dénote que le travail et l’emploi sont devenus non seulement une question centrale dans l’approche genre, mais représentent la centralité des recherches en genre sur l’Afrique.
Jacques Charmes et Malika Remaoun, dans leur contribution « Travail, ‘care’ et temps social : le triple temps des femmes africaines. Les nouvelles approches de la féminisation de la pauvreté », partent du constat qu’en Afrique sub-saharienne, malgré des taux d’activités féminines les plus élevés du monde, les femmes, ne jouissent pas d’une grande autonomie. L’étude des résultats obtenus des enquêtes sur les emplois du temps permettent de qualifier le temps de travail des femmes en Afrique de triple emploi du temps, de mesurer l’ampleur aussi bien du travail rémunéré que du travail non rémunéré, dont le ‘care’ ainsi que le travail social consacré aux activités ou communautaires. Les deux auteurs s’appuient sur la charge globale des femmes en temps de travail pour souligner qu’elle est l’une des plus élevées et que de forts écarts sont constatés, entre les hommes et les femmes. Ils avancent l’idée que « le concept de pauvreté en temps, du fait d’un emploi du temps surchargé, permet de comprendre les racines des inégalités face à l’accès aux ressources ». Ils concluent que l’analyse des inégalités face au temps montre qu’elles constituent un « handicap difficile à surmonter dans la perspective d’une plus grande autonomisation et participation des femmes à la vie économique et sociale ».
Omar Derras aborde la question de la mobilité sociale des femmes actives en Algérie pour rendre visibles les inégalités de chances et les différenciations sociales entre les deux sexes. Cette étude est une valeur ajoutée dans l’analyse du travail des femmes du fait que la question de la mobilité est très peu abordée. Par ailleurs, l’auteur présente une analyse de données statistiques et mène une réflexion sur la mobilité professionnelle ou intergénérationnelle des femmes par comparaison à celles des hommes. Il aborde les instances génératrices de mobilité sociale des femmes comme le système éducatif et l’institution du mariage qu’il qualifie d’agences centrales dans le processus de positionnement final des femmes. Il met, également, « l’accent sur la rigidité et la stabilité professionnelle en relation avec la présence des femmes actives dans des secteurs d’activités économiques spécifiques et ce, en corrélation avec les valeurs qu’elles véhiculent comme la religion, la famille, les études, l’amitié, l’argent et la politique ».
Fanta Diallo Maigo aborde la mobilité des Camerounaises, grossistes de la banane plantain, pour mettre en exergue les bonnes pratiques dans la lutte contre la vulnérabilité et pour promouvoir l’autonomisation des femmes immigrées au Gabon.
En tant que femmes vulnérables, actrices de leurs migrations vers le Gabon, les Camerounaises s’appuient sur leur savoir-faire, et saisissent l’opportunité d’une conjoncture favorable du commerce de la banane et deviennent pionnières parmi les opérateurs économiques issus de l’immigration à Libreville.
Gilbert Malemba N’Sakila, dans son article « Le genre à l’épreuve en République Démocratique du Congo : les pratiques contre la théorie », s’appuie sur une grille d’analyse culturelle dans une perspective historique. L’auteur analyse « le prétexte social » de la considération des femmes, examine l’opportunité historique du genre, et enfin illustre les difficultés de l’applicabilité de l’idée de parité dues aux différenciations sociales et présente les perspectives d’avenir.
Pascal Touoyem, par l’approche de la « gouvernance “au féminin” comme droit au développement au-delà de l’impasse, les alternatives », propose que le développement soit saisi au sens de l’accomplissement de l’humain comme devoir moral s’inscrivant dans un processus. L’auteur illustre ses propos par l’expérience du Centre interdisciplinaire pour le développement et les droits humains pour la promotion de la paix et la non-violence, CIPAD. L’auteur propose une alternative, par les interrogations sur la pertinence du matriarcat, la déconstruction des postulats dominants et la perspective d’une transformation sociale non-violente.
Dans une perspective moins ambitieuse que la gouvernance féminine comme alternative à la gouvernance dans le système du patriarcat comme système de domination masculine, Fatma Boufenik propose une étude des « activités génératrices de revenus : l’accès des femmes aux ressources économiques en Algérie » comme perspective de lutte contre la pauvreté. L’auteure analyse certaines pratiques et expériences en formation et les lie aux objectifs du millénaire pour le développement. A ce titre, elle souligne l’importance d’une stratégie qui consiste, entre autres, en la mise en œuvre des mécanismes d’accompagnement et de renforcement des rôles des politiques publiques.
Jacques Charmes et Malika Remaoun, dans leur contribution « Travail, ‘care’ et temps social : le triple temps des femmes africaines. Les nouvelles approches de la féminisation de la pauvreté », partent du constat qu’en Afrique sub-saharienne, malgré des taux d’activités féminines les plus élevés du monde, les femmes, ne jouissent pas d’une grande autonomie. L’étude des résultats obtenus des enquêtes sur les emplois du temps permettent de qualifier le temps de travail des femmes en Afrique de triple emploi du temps, de mesurer l’ampleur aussi bien du travail rémunéré que du travail non rémunéré, dont le ‘care’ ainsi que le travail social consacré aux activités ou communautaires. Les deux auteurs s’appuient sur la charge globale des femmes en temps de travail pour souligner qu’elle est l’une des plus élevées et que de forts écarts sont constatés, entre les hommes et les femmes. Ils avancent l’idée que « le concept de pauvreté en temps, du fait d’un emploi du temps surchargé, permet de comprendre les racines des inégalités face à l’accès aux ressources ». Ils concluent que l’analyse des inégalités face au temps montre qu’elles constituent un « handicap difficile à surmonter dans la perspective d’une plus grande autonomisation et participation des femmes à la vie économique et sociale ».
Omar Derras aborde la question de la mobilité sociale des femmes actives en Algérie pour rendre visibles les inégalités de chances et les différenciations sociales entre les deux sexes. Cette étude est une valeur ajoutée dans l’analyse du travail des femmes du fait que la question de la mobilité est très peu abordée. Par ailleurs, l’auteur présente une analyse de données statistiques et mène une réflexion sur la mobilité professionnelle ou intergénérationnelle des femmes par comparaison à celles des hommes. Il aborde les instances génératrices de mobilité sociale des femmes comme le système éducatif et l’institution du mariage qu’il qualifie d’agences centrales dans le processus de positionnement final des femmes. Il met, également, « l’accent sur la rigidité et la stabilité professionnelle en relation avec la présence des femmes actives dans des secteurs d’activités économiques spécifiques et ce, en corrélation avec les valeurs qu’elles véhiculent comme la religion, la famille, les études, l’amitié, l’argent et la politique ».
Fanta Diallo Maigo aborde la mobilité des Camerounaises, grossistes de la banane plantain, pour mettre en exergue les bonnes pratiques dans la lutte contre la vulnérabilité et pour promouvoir l’autonomisation des femmes immigrées au Gabon.
En tant que femmes vulnérables, actrices de leurs migrations vers le Gabon, les Camerounaises s’appuient sur leur savoir-faire, et saisissent l’opportunité d’une conjoncture favorable du commerce de la banane et deviennent pionnières parmi les opérateurs économiques issus de l’immigration à Libreville.
Gilbert Malemba N’Sakila, dans son article « Le genre à l’épreuve en République Démocratique du Congo : les pratiques contre la théorie », s’appuie sur une grille d’analyse culturelle dans une perspective historique. L’auteur analyse « le prétexte social » de la considération des femmes, examine l’opportunité historique du genre, et enfin illustre les difficultés de l’applicabilité de l’idée de parité dues aux différenciations sociales et présente les perspectives d’avenir.
Pascal Touoyem, par l’approche de la « gouvernance “au féminin” comme droit au développement au-delà de l’impasse, les alternatives », propose que le développement soit saisi au sens de l’accomplissement de l’humain comme devoir moral s’inscrivant dans un processus. L’auteur illustre ses propos par l’expérience du Centre interdisciplinaire pour le développement et les droits humains pour la promotion de la paix et la non-violence, CIPAD. L’auteur propose une alternative, par les interrogations sur la pertinence du matriarcat, la déconstruction des postulats dominants et la perspective d’une transformation sociale non-violente.
Dans une perspective moins ambitieuse que la gouvernance féminine comme alternative à la gouvernance dans le système du patriarcat comme système de domination masculine, Fatma Boufenik propose une étude des « activités génératrices de revenus : l’accès des femmes aux ressources économiques en Algérie » comme perspective de lutte contre la pauvreté. L’auteure analyse certaines pratiques et expériences en formation et les lie aux objectifs du millénaire pour le développement. A ce titre, elle souligne l’importance d’une stratégie qui consiste, entre autres, en la mise en œuvre des mécanismes d’accompagnement et de renforcement des rôles des politiques publiques.
Conclusion
Si le compte-rendu de l’ouvrage Les Femmes Africaines à l’épreuve du développement a été fait dans une perspective de genre, il est évident que c’est le rapport des femmes africaines au développement qui a, à la fois, suggéré et rendu possible cette démarche. Par ailleurs, si cet ouvrage, par sa publication, est la capitalisation du Colloque international organisé à Alger en juillet 2009 à l’occasion du second Festival panafricain de la culture, sa diffusion vient à point pour les femmes africaines au vu des incertitudes sociales, économiques et politiques que traverse la planète et auxquelles le continent africain ne peut échapper. Pour les femmes algériennes, cette publication constitue, sans aucun doute, une valeur ajoutée dans la célébration du 50èmeanniversaire de l’indépendance nationale.
notes
[i] Les nouveaux défis sont présentés dans le résumé de l’ouvrage comme étant « liés aux nouveaux rôles que jouent les femmes » dans le dépassement « des problèmes sociaux, économiques et politiques inhérent» pour atteindre l’égalité des chances dans le développement économique.
[ii] L’auteure s’appuie sur l’expérience auprès des quinze pays africains suivants : Sénégal, Mauritanie, Guinée, Mali, Côte d’Ivoire, Cameroun, Togo, Gabon, Tchad, Congo, République démocratique du Congo, Rwanda, Burundi, Djibouti, Maroc.
[iii] Le résultat du travail de l’auteure en référence a été publié dans un ouvrage en 2001 et a été plusieurs fois primé aux Etats-Unis, cependant il reste peu diffusé.
[iv]Charrad M. Mounira, State Building and Women’s Rights: The Making of Postcolonial Tunisia, Algeria, and Morocco, University of California Press, 2001.
[v] Clair Isabelle, Sociologie du genre, Armand Colin, Paris, 2012, p.101.
[ii] L’auteure s’appuie sur l’expérience auprès des quinze pays africains suivants : Sénégal, Mauritanie, Guinée, Mali, Côte d’Ivoire, Cameroun, Togo, Gabon, Tchad, Congo, République démocratique du Congo, Rwanda, Burundi, Djibouti, Maroc.
[iii] Le résultat du travail de l’auteure en référence a été publié dans un ouvrage en 2001 et a été plusieurs fois primé aux Etats-Unis, cependant il reste peu diffusé.
[iv]Charrad M. Mounira, State Building and Women’s Rights: The Making of Postcolonial Tunisia, Algeria, and Morocco, University of California Press, 2001.
[v] Clair Isabelle, Sociologie du genre, Armand Colin, Paris, 2012, p.101.
Auteur
Fatma BOUFENIK
Pagination
Pages 15-17