Le Paris noir
de Pascal Blanchard, Eric Deroo, Gilles Manceron, Edition Hazan, 2001, 239 pages. ISBN 2-85025-7613, 48.95 Euro
Le Paris Arabe, deux siècles de présence des Orientaux et des Maghrébins
par Pascal Blanchard, Éric Deroo, Driss El Yazami, Pierre Fournié, Gilles Manceron, La Découverte, 2003, 247 pages, ISBN 2-701-3904-1, 39.90 Euro.
Existe-t-il un Paris africain ? Il semble bien en tout cas que les Africains, Noirs ou Arabo-berbères soient suffisamment incrustés dans la capitale française pour que le paysage humain, de la ville et son histoire au moins contemporaine, en aient été largement imprégnés. Réflexion faite, il n’y a pas de quoi être étonné : Paris est certes la ville de la Révolution de 1789 et de la déclaration universelle des Droits de l’homme et du citoyen, mais fût aussi jusqu’au siècle dernier une des principales métropoles coloniales d’un monde oppressif où nous vivions, (a-t-il complètement disparu ?). Ces deux facteurs a priori antagoniques vont se conjuguer pour marquer l’histoire de la Ville lumière, dans sa relation au Sud de la planète. Deux ouvrages, en fait deux beaux livres, grand format et abondamment illustrés publiés ces dernières années (Le Paris noir, et Le Paris arabe), évoquent de manière fouillée et sur la base d’archives parfois méconnues et une riche iconographie, cette présence de l’Afrique à Paris.
1. Le Paris noir
Le Paris noir est un ouvrage composé de 6 chapitres illustrés par 350 documents iconographiques. À Paris est- il noté dans l’introduction « s’écrivent, se font et s’évanouissent les rêves de la diaspora… Qu’elle soit afro-américaine, africaine ou antillaise, elle va pendant plus d’un siècle y trouver un point de convergence unique pour s’adresser au monde ». Durant la période abordée qui va de l’Exposition universelle de 1878, à la Coupe du monde de football en 1998, la progression numérique de ce qu’on appellera « les Nègres », « les Noirs » où « les Blacks » permettra de passer de quelques centaines, à près de 20 % de la population d’une ville qui devient très métissée, surtout si l’on y ajoute les émigrés venus des autres coins du monde.
Le chapitre I, La sauvagerie noire inventée (1878-1912), traite de la période où les noirs sont exposés en spectacle avec un décor censé représenter leur environnement naturel et social, comme c’est le cas lors de l’Exposition universelle de Paris de 1878, ou dans les attractions de foires, de cirques et même de cabarets de la Belle époque.
Cette pratique des « zoos humains » remonterait en fait au moins au début du XIXe siècle comme le montre le cas de la « Vénus Hottentote » promenée un peu partout dans Paris et en Europe*. C’est aussi l’époque de « l’anthropologie » physique encouragée par l’expansion coloniale. On s’intéresse à « l’indice nasal » et « l’indice céphaloïde », à la couleur de la peau, « et l’on détourne l’outil photographique à des profits pseudo-scientifiques », (p.20) tandis que l’image stéréotypée du « nègre » apparaît dans les affiches publicitaires. Cependant en 1878, le Guadeloupéen Sosthène Mortenol, « est le premier noir à entrer à l’École polytechnique ». Les étudiants africains suivront avec par exemple Lamine Gueye né à Saint Louis du Sénégal et qui arrive à Paris en 1912 pour passer son baccalauréat, tandis que sur la lancée de l’exotisme colonial, l’Art nègre pointe à l’horizon. C’est ainsi que « Picasso fait remonter à une visite des puces de la Porte de Clignancourt, en 1907, sa découverte des sculptures et des masques africains qui a été déterminante pour sa vocation d’artiste » (p.41). Entre temps, à l’orée des XIXe et XXe siècles les premiers députés noirs (représentant les Antilles),font leur entrée à l’Assemblée française.
Le chapitre II, La force noire mobilisée, aborde la période 1913 -1924. Si des soldats noirs semblent avoir servi dans l’armée française dès le XVIIe siècle, c’est en 1857 que fût crée par Faidherbe, le corps des « Tirailleurs sénégalais » qui comprendra 26.000 soldats à la veille de la guerre 1914-1918.
En fait, une grande partie de la jeunesse de ce qui fut l’Afrique occidentale française (AOF) puis de l’Afrique équatoriale française (AEF), sera extraite de ses villages jusqu’à atteindre 180.000 recrues durant le conflit dont 134.000 seront affectées en Europe, auxquels il faudra ajouter dans des corps d’armée métropolitains quelques dizaines de milliers d’Antillais Guyanais, Réunionnais, et des « Quatre communes » du Sénégal, voir quelques régiments d’Américains noirs venus servir en France à la fin de la guerre et qui découvriront des rapports avec les Blancs plus humanisés que dans leur pays d’origine ou régnait la discrimination raciale. A l’image stéréotypée du « nègre » vient en effet s’ajouter ici celle du combattant (34.000 morts et disparus durant la guerre) qui suscite un comportement chez les Français mêlé de paternalisme et d’humanisme républicain différent de l’arrogance coloniale en cours dans les pays d’origine.
Les Noirs déjà représentés dans la littérature anti-raciste en France1 commencent, à s’installer en nombre important en Métropole. Si les discriminations sont encore existantes (promotions dans la carrière militaire ou professionnelle, pensions inégales entre Blancs et Noirs…), quelques Africaines peuvent même accéder au statut de citoyenneté tandis que des couples mixtes voient le jour. Une minorité commence à émerger en empruntant les voies du spectacle (Music - Hall sur la lancée des Noirs américains) du sport (athlétisme, boxe), des études et bien entendu du militantisme syndical et politique préparent les élites pour les futurs Mouvements nationaux.
Le chapitre III, Revue nègre et spectacle colonial, s’intéresse à la période 1925 -1939. Les sources du Ministère des colonies estiment la présence des Noirs africains en France pour l’année 1926 à 2.580 personnes dont 793 dans la capitale.
En fait, il semblerait que ces chiffres doivent être multipliés par trois. La majorité d’entre eux, (70 %) travaillaient à l’usine (Renault, Citroën, Chocolat Amieux…) 20 % étaient des employés (sociétés de Gaz de Paris et de transport), quelques dizaines étaient étudiants (surtout en droit et en médecine), ce à quoi il fallait ajouter de nombreux domestiques, souvent ramenés en Métropole et séquestrés par des fonctionnaires coloniaux retraités. Les Noirs antillais et des autres anciennes colonies étaient au nombre de 2.500 à 3.000 personnes dans Paris et sa banlieue et de condition sociale plus diversifiée. Si on y ajoute quelques dizaines de Haïtiens, Canaques, Éthiopiens (étudiants) et plusieurs centaines de Blacks américains, il y aurait eu donc plus de 5.000 Noirs à Paris à la veille de 1930. Les Noirs américains surtout avec des vedettes de Music Hall, tels Joséphine Baker, Sydney Bechet, Louis Armstrong, Duke Ellington, Bessie Smith vont contribuer à répandre les rythmes afro-américains (Jazz, Samba, Charleston…) et les Revues noires dans le Paris by night. La période sera marquée aussi par l’Exposition coloniale de 1931 (après les commémorations du Centenaire de la colonisation de l’Algérie en 1930), organisée au voisinage du Bois de Vincennes. L’Afrique y sera représentée par différents pavillons exotiques et 1500 figurants qui chaque soir présenteront un spectacle (du 6 mai au 15 novembre). Cette exposition qui aurait été visitée par 8 million de personnes mais boycottée par la minorité noire résident à Paris (témoignage de Léopold Senghor), a suscité des réactions anti-coloniales avec le manifeste signé par des intellectuels proches du Parti communiste (André Breton, Paul Eluard, Louis Aragon, Georges Sadoul, René Char…) et la tenue d’une « mini-exposition » ayant attiré à peine quelques milliers de visiteurs, place du Colonel Fabien.
L’engouement pour l’Art nègre et l’ethnographie africaine avec expositions et ouverture de ce qui deviendra Le Musée des Arts africains et océaniens et l’organisation de la Mission ethnographique et linguistique Dakar Djibouti (1931-1932) par des universitaires (Marcel Griaule, Michel Leiris …), n’empêchera pas dans les années 1930 avec la montée de l’extrême droite l’émergence de mouvements prônant le racisme, mais aussi la radicalisation anti colonialiste des émigrés venus des colonies.
Le chapitre IV, Afrique sur Seine, cible la période 1940-1962, qui commence avec la Seconde Guerre mondiale et s’achève avec les indépendances. Sur les 64.299 tirailleurs engagés dans le conflit, 24.271 sont tués ou portés disparus. Les militaires noirs sont particulièrement visés par les nazis, après la Débâcle beaucoup d’entre eux sont d’ailleurs fusillés ou meurent en détention dans le Nord de la France et ce dans l’indifférence du régime de Vichy qui continue pourtant à mener une propagande autour de la grandeur de « l’Empire ».
Si les Blacks américains doivent quitter la France au début de la guerre tandis que des Africains ou Antillais rejoignent la résistance, il ne semble pas que les occupants aient mené une véritable répression contre les Noirs restés à Paris et dont beaucoup continuent à animer les nuits parisiennes dont raffolaient les Allemands qui espéraient par ailleurs récupérer leurs anciennes colonies du Togo et du Cameroun. Avec la défaite allemande et la présence des troupes américaines, la vie artistique reprendra de plus belle. La révolte qui cependant commence à gronder en Afrique (Algérie, Sénégal, Madagascar …), et l’accès de leaders des colonies à l’Assemblée nationale élue en 1946 (laquelle comprend 27 députés africains tels Senghor et Lamine Guèye pour le Sénégal et Houphouët-Boigny pour la Côte d’Ivoire, sur un total de 64 élus d’Outre-mer) va accentuer la politisation et les revendications indépendantistes. La revue Présence africaine est lancée en 1947, tandis que la Fédération des étudiants d’Afrique noire en France (FEANF) voit le jour en 1950 (plus de 5.000 étudiants noirs dont 17 % de femmes sont inscrits à Paris). En 1956 se tient à la Sorbonne le premier Congrès des Écrivains et Artistes noirs, (auquel participent Amadou Hampaté Bâ, Senghor, Cheikh Anta Diop, Richard Wright, Aimé Césaire, Frantz Fanon…). Entre temps il y a eu Dien Bien Phu, le déclenchement des guerres de libération au Maghreb et Bandung. À travers d’autres voies et moyens, l’Afrique noire n’est pas en reste : « Union française (1946-1958), régime de Loi-cadre (1956-1958), Communauté (19581960), Communauté rénovée (1960-1961)… autant de termes législatifs et constitutionnels illustrant quinze années de débats qui, à Paris, conduisent inexorablement l’Afrique vers les indépendances » (p.113).
Le chapitre V, La Présence Black, explore la période allant de 1963 à 1985. C’est durant cette ère qui suivit les indépendances que l’immigration tout d’abord encouragée par les autorités françaises en quête de main-d’œuvre deviendra massive. Entre 1965 et 1975 le nombre de travailleurs africains passera à 100.000 activant dans les emplois les moins qualifiés et les plus bas rémunérés et, dans des conditions de vie les plus précaires à la merci des « marchands de sommeil ». De même le nombre d’Antillais et Guyanais en France passe de 67.000 en 1968 à 350.000 en 1983 dont la moitié dans la région parisienne où ils activent surtout dans le secteur hospitalier, le métro, (RATP), la poste (les PTT) ou à l’usine. À cela, il faudra ajouter les étudiants noirs venus des nouveaux États indépendants (21.000 dans les années 1980) et bien entendu les opposants politiques aux régimes de leurs pays d’origine.
L’émigration conçue à l’origine comme provisoire va en fait s’avérer durable ou définitive et de nombreuses luttes seront menées pour l’amélioration de leurs conditions de travail et d’habitat (avec l’appui d’associations d’émigrés et des syndicats français). Après le choc pétrolier de 1973 surtout, et la récession de l’offre d’emploi, il faudra lutter aussi contre la montée du racisme et de la xénophobie dont se servent les partis de l’extrême-droite (avec Le Pen notamment).
Cette situation aura un impact sur les tendances aux replis identitaires et religieux des immigrés, mais aussi à une intense activité sociale et culturelle : débats contradictoires autour du thème de la négritude et popularisation en France d’une musique noire qui ne soit pas seulement afro-américaine. L’association SOS Racisme dirigée par Harlem Désir (un Antillais d’origine) se fera connaître notamment par de grands concerts de musique : 300.000 personnes participent à celui organisé en Juin 1985, Place de la Concorde à Paris. Des personnalités sportives comme le champion de tennis franco-camerounais Yannick Noah seront adulées du public français.
Le chapitre VI, Sans papiers et champions du Monde (1986–1998), permet enfin de conclure cet ouvrage. C’est la période des regroupements familiaux avec une immigration négro-africaine qui passe de 200.000 personnes en 1990 à 400.000 ou 450.000 en 2000 (selon l’INSEE).Les flux des Ivoiriens, des Camerounais, des Ghanéens et des Congolais (Congo-Brazza) ont tendance à se faire plus importants que ceux des Maliens et Sénégalais qui alimentaient l’immigration traditionnelle. Les Antillais continuent aussi à arriver massivement 212.000 personnes auxquelles il faudra ajouter les 337.000 nées en France. Étant tous de nationalité française, ils ont cependant un statut différent de celui des Africains, dont un grand nombre se retrouvent « sans papiers » donc en situation irrégulière, occupant quand ils le peuvent les emplois les plus précaires, et menacés d’arrestation et d’expulsion à chaque contrôle de police. Des charters sont même affrétés pour cela, le premier d’entre eux atterrit en octobre 1986 à Bamako. Comme d’autres populations aux revenus modestes, les immigrés africains « sont contraints de glisser à la périphérie de Paris » mais, « conservent l’habitude de se rendre dans certains quartiers centraux » (P.195) (Le XIXe arrondissement ou le quartier de la Goutte d’Or).
Acceptés par une partie de la population française, et regardés avec méfiance par d’autres (mais c’est le cas pour la majeure partie des immigrés d’origine non européenne), les Africains font désormais partie du paysage culturel parisien. Ils sont présents dans les nombreuses expositions d’arts africains (avec l’engouement en Europe pour les « Arts premiers »)2, bien entendu dans la musique et le spectacle et commencent à percer des domaines comme la littérature et la haute couture3. Mais c’est par le sport qu’ils émergent vraiment donnant des idoles à la jeunesse, notamment lors des compétitions internationales de football comme le Mondial de 1998, même si « l’équipe de ‘‘France Black-Blanc-Beur’’ peut être qualifiée à juste titre de trompe-l’œil masquant les discriminations et les préjugés dans la vie de tous les jours » (p.201). Ces Africains d’Europe tout en réalisant que leur identité est plus que jamais plurielle n’oublient pas « leur savane »4
La grande manifestation de solidarité avec les immigrés «sans papiers » qui eut lieu en été 1996 arborait d’ailleurs une large banderole sur laquelle on pouvait lire « Vive l’Afrique ! ».
Le chapitre I, La sauvagerie noire inventée (1878-1912), traite de la période où les noirs sont exposés en spectacle avec un décor censé représenter leur environnement naturel et social, comme c’est le cas lors de l’Exposition universelle de Paris de 1878, ou dans les attractions de foires, de cirques et même de cabarets de la Belle époque.
Cette pratique des « zoos humains » remonterait en fait au moins au début du XIXe siècle comme le montre le cas de la « Vénus Hottentote » promenée un peu partout dans Paris et en Europe*. C’est aussi l’époque de « l’anthropologie » physique encouragée par l’expansion coloniale. On s’intéresse à « l’indice nasal » et « l’indice céphaloïde », à la couleur de la peau, « et l’on détourne l’outil photographique à des profits pseudo-scientifiques », (p.20) tandis que l’image stéréotypée du « nègre » apparaît dans les affiches publicitaires. Cependant en 1878, le Guadeloupéen Sosthène Mortenol, « est le premier noir à entrer à l’École polytechnique ». Les étudiants africains suivront avec par exemple Lamine Gueye né à Saint Louis du Sénégal et qui arrive à Paris en 1912 pour passer son baccalauréat, tandis que sur la lancée de l’exotisme colonial, l’Art nègre pointe à l’horizon. C’est ainsi que « Picasso fait remonter à une visite des puces de la Porte de Clignancourt, en 1907, sa découverte des sculptures et des masques africains qui a été déterminante pour sa vocation d’artiste » (p.41). Entre temps, à l’orée des XIXe et XXe siècles les premiers députés noirs (représentant les Antilles),font leur entrée à l’Assemblée française.
Le chapitre II, La force noire mobilisée, aborde la période 1913 -1924. Si des soldats noirs semblent avoir servi dans l’armée française dès le XVIIe siècle, c’est en 1857 que fût crée par Faidherbe, le corps des « Tirailleurs sénégalais » qui comprendra 26.000 soldats à la veille de la guerre 1914-1918.
En fait, une grande partie de la jeunesse de ce qui fut l’Afrique occidentale française (AOF) puis de l’Afrique équatoriale française (AEF), sera extraite de ses villages jusqu’à atteindre 180.000 recrues durant le conflit dont 134.000 seront affectées en Europe, auxquels il faudra ajouter dans des corps d’armée métropolitains quelques dizaines de milliers d’Antillais Guyanais, Réunionnais, et des « Quatre communes » du Sénégal, voir quelques régiments d’Américains noirs venus servir en France à la fin de la guerre et qui découvriront des rapports avec les Blancs plus humanisés que dans leur pays d’origine ou régnait la discrimination raciale. A l’image stéréotypée du « nègre » vient en effet s’ajouter ici celle du combattant (34.000 morts et disparus durant la guerre) qui suscite un comportement chez les Français mêlé de paternalisme et d’humanisme républicain différent de l’arrogance coloniale en cours dans les pays d’origine.
Les Noirs déjà représentés dans la littérature anti-raciste en France1 commencent, à s’installer en nombre important en Métropole. Si les discriminations sont encore existantes (promotions dans la carrière militaire ou professionnelle, pensions inégales entre Blancs et Noirs…), quelques Africaines peuvent même accéder au statut de citoyenneté tandis que des couples mixtes voient le jour. Une minorité commence à émerger en empruntant les voies du spectacle (Music - Hall sur la lancée des Noirs américains) du sport (athlétisme, boxe), des études et bien entendu du militantisme syndical et politique préparent les élites pour les futurs Mouvements nationaux.
Le chapitre III, Revue nègre et spectacle colonial, s’intéresse à la période 1925 -1939. Les sources du Ministère des colonies estiment la présence des Noirs africains en France pour l’année 1926 à 2.580 personnes dont 793 dans la capitale.
En fait, il semblerait que ces chiffres doivent être multipliés par trois. La majorité d’entre eux, (70 %) travaillaient à l’usine (Renault, Citroën, Chocolat Amieux…) 20 % étaient des employés (sociétés de Gaz de Paris et de transport), quelques dizaines étaient étudiants (surtout en droit et en médecine), ce à quoi il fallait ajouter de nombreux domestiques, souvent ramenés en Métropole et séquestrés par des fonctionnaires coloniaux retraités. Les Noirs antillais et des autres anciennes colonies étaient au nombre de 2.500 à 3.000 personnes dans Paris et sa banlieue et de condition sociale plus diversifiée. Si on y ajoute quelques dizaines de Haïtiens, Canaques, Éthiopiens (étudiants) et plusieurs centaines de Blacks américains, il y aurait eu donc plus de 5.000 Noirs à Paris à la veille de 1930. Les Noirs américains surtout avec des vedettes de Music Hall, tels Joséphine Baker, Sydney Bechet, Louis Armstrong, Duke Ellington, Bessie Smith vont contribuer à répandre les rythmes afro-américains (Jazz, Samba, Charleston…) et les Revues noires dans le Paris by night. La période sera marquée aussi par l’Exposition coloniale de 1931 (après les commémorations du Centenaire de la colonisation de l’Algérie en 1930), organisée au voisinage du Bois de Vincennes. L’Afrique y sera représentée par différents pavillons exotiques et 1500 figurants qui chaque soir présenteront un spectacle (du 6 mai au 15 novembre). Cette exposition qui aurait été visitée par 8 million de personnes mais boycottée par la minorité noire résident à Paris (témoignage de Léopold Senghor), a suscité des réactions anti-coloniales avec le manifeste signé par des intellectuels proches du Parti communiste (André Breton, Paul Eluard, Louis Aragon, Georges Sadoul, René Char…) et la tenue d’une « mini-exposition » ayant attiré à peine quelques milliers de visiteurs, place du Colonel Fabien.
L’engouement pour l’Art nègre et l’ethnographie africaine avec expositions et ouverture de ce qui deviendra Le Musée des Arts africains et océaniens et l’organisation de la Mission ethnographique et linguistique Dakar Djibouti (1931-1932) par des universitaires (Marcel Griaule, Michel Leiris …), n’empêchera pas dans les années 1930 avec la montée de l’extrême droite l’émergence de mouvements prônant le racisme, mais aussi la radicalisation anti colonialiste des émigrés venus des colonies.
Le chapitre IV, Afrique sur Seine, cible la période 1940-1962, qui commence avec la Seconde Guerre mondiale et s’achève avec les indépendances. Sur les 64.299 tirailleurs engagés dans le conflit, 24.271 sont tués ou portés disparus. Les militaires noirs sont particulièrement visés par les nazis, après la Débâcle beaucoup d’entre eux sont d’ailleurs fusillés ou meurent en détention dans le Nord de la France et ce dans l’indifférence du régime de Vichy qui continue pourtant à mener une propagande autour de la grandeur de « l’Empire ».
Si les Blacks américains doivent quitter la France au début de la guerre tandis que des Africains ou Antillais rejoignent la résistance, il ne semble pas que les occupants aient mené une véritable répression contre les Noirs restés à Paris et dont beaucoup continuent à animer les nuits parisiennes dont raffolaient les Allemands qui espéraient par ailleurs récupérer leurs anciennes colonies du Togo et du Cameroun. Avec la défaite allemande et la présence des troupes américaines, la vie artistique reprendra de plus belle. La révolte qui cependant commence à gronder en Afrique (Algérie, Sénégal, Madagascar …), et l’accès de leaders des colonies à l’Assemblée nationale élue en 1946 (laquelle comprend 27 députés africains tels Senghor et Lamine Guèye pour le Sénégal et Houphouët-Boigny pour la Côte d’Ivoire, sur un total de 64 élus d’Outre-mer) va accentuer la politisation et les revendications indépendantistes. La revue Présence africaine est lancée en 1947, tandis que la Fédération des étudiants d’Afrique noire en France (FEANF) voit le jour en 1950 (plus de 5.000 étudiants noirs dont 17 % de femmes sont inscrits à Paris). En 1956 se tient à la Sorbonne le premier Congrès des Écrivains et Artistes noirs, (auquel participent Amadou Hampaté Bâ, Senghor, Cheikh Anta Diop, Richard Wright, Aimé Césaire, Frantz Fanon…). Entre temps il y a eu Dien Bien Phu, le déclenchement des guerres de libération au Maghreb et Bandung. À travers d’autres voies et moyens, l’Afrique noire n’est pas en reste : « Union française (1946-1958), régime de Loi-cadre (1956-1958), Communauté (19581960), Communauté rénovée (1960-1961)… autant de termes législatifs et constitutionnels illustrant quinze années de débats qui, à Paris, conduisent inexorablement l’Afrique vers les indépendances » (p.113).
Le chapitre V, La Présence Black, explore la période allant de 1963 à 1985. C’est durant cette ère qui suivit les indépendances que l’immigration tout d’abord encouragée par les autorités françaises en quête de main-d’œuvre deviendra massive. Entre 1965 et 1975 le nombre de travailleurs africains passera à 100.000 activant dans les emplois les moins qualifiés et les plus bas rémunérés et, dans des conditions de vie les plus précaires à la merci des « marchands de sommeil ». De même le nombre d’Antillais et Guyanais en France passe de 67.000 en 1968 à 350.000 en 1983 dont la moitié dans la région parisienne où ils activent surtout dans le secteur hospitalier, le métro, (RATP), la poste (les PTT) ou à l’usine. À cela, il faudra ajouter les étudiants noirs venus des nouveaux États indépendants (21.000 dans les années 1980) et bien entendu les opposants politiques aux régimes de leurs pays d’origine.
L’émigration conçue à l’origine comme provisoire va en fait s’avérer durable ou définitive et de nombreuses luttes seront menées pour l’amélioration de leurs conditions de travail et d’habitat (avec l’appui d’associations d’émigrés et des syndicats français). Après le choc pétrolier de 1973 surtout, et la récession de l’offre d’emploi, il faudra lutter aussi contre la montée du racisme et de la xénophobie dont se servent les partis de l’extrême-droite (avec Le Pen notamment).
Cette situation aura un impact sur les tendances aux replis identitaires et religieux des immigrés, mais aussi à une intense activité sociale et culturelle : débats contradictoires autour du thème de la négritude et popularisation en France d’une musique noire qui ne soit pas seulement afro-américaine. L’association SOS Racisme dirigée par Harlem Désir (un Antillais d’origine) se fera connaître notamment par de grands concerts de musique : 300.000 personnes participent à celui organisé en Juin 1985, Place de la Concorde à Paris. Des personnalités sportives comme le champion de tennis franco-camerounais Yannick Noah seront adulées du public français.
Le chapitre VI, Sans papiers et champions du Monde (1986–1998), permet enfin de conclure cet ouvrage. C’est la période des regroupements familiaux avec une immigration négro-africaine qui passe de 200.000 personnes en 1990 à 400.000 ou 450.000 en 2000 (selon l’INSEE).Les flux des Ivoiriens, des Camerounais, des Ghanéens et des Congolais (Congo-Brazza) ont tendance à se faire plus importants que ceux des Maliens et Sénégalais qui alimentaient l’immigration traditionnelle. Les Antillais continuent aussi à arriver massivement 212.000 personnes auxquelles il faudra ajouter les 337.000 nées en France. Étant tous de nationalité française, ils ont cependant un statut différent de celui des Africains, dont un grand nombre se retrouvent « sans papiers » donc en situation irrégulière, occupant quand ils le peuvent les emplois les plus précaires, et menacés d’arrestation et d’expulsion à chaque contrôle de police. Des charters sont même affrétés pour cela, le premier d’entre eux atterrit en octobre 1986 à Bamako. Comme d’autres populations aux revenus modestes, les immigrés africains « sont contraints de glisser à la périphérie de Paris » mais, « conservent l’habitude de se rendre dans certains quartiers centraux » (P.195) (Le XIXe arrondissement ou le quartier de la Goutte d’Or).
Acceptés par une partie de la population française, et regardés avec méfiance par d’autres (mais c’est le cas pour la majeure partie des immigrés d’origine non européenne), les Africains font désormais partie du paysage culturel parisien. Ils sont présents dans les nombreuses expositions d’arts africains (avec l’engouement en Europe pour les « Arts premiers »)2, bien entendu dans la musique et le spectacle et commencent à percer des domaines comme la littérature et la haute couture3. Mais c’est par le sport qu’ils émergent vraiment donnant des idoles à la jeunesse, notamment lors des compétitions internationales de football comme le Mondial de 1998, même si « l’équipe de ‘‘France Black-Blanc-Beur’’ peut être qualifiée à juste titre de trompe-l’œil masquant les discriminations et les préjugés dans la vie de tous les jours » (p.201). Ces Africains d’Europe tout en réalisant que leur identité est plus que jamais plurielle n’oublient pas « leur savane »4
La grande manifestation de solidarité avec les immigrés «sans papiers » qui eut lieu en été 1996 arborait d’ailleurs une large banderole sur laquelle on pouvait lire « Vive l’Afrique ! ».
2. Le Paris arabe
Écrit par cinq auteurs (dont les trois ayant rédigé le Paris noir) qui ont sélectionné pour illustrer le livre quelques 500 documents iconographiques (après en avoir trié 10.000 !), le Paris arabe qu’inaugurent un avant propos de Bertrand Delanoë, maire de Paris, ainsi qu’une introduction synthétique et documentée est composé de 7 chapitres non numérotés. Les chapitres sont organisés en séquences de deux pages (78 en tout), abondamment illustrées.
Mais qu’est-ce qu’un Arabe à Paris ? Les auteurs s’en expliquent longuement, et parmi d’autres nous nous arrêterons sur ce long passage : « Qui se souvient aujourd’hui que cette présence dans la capitale, depuis le début du XIXe siècle est d’une richesse incroyable ? Chaque époque possède pourtant des particularismes forts. Mais aussi des mots et des images qui caractérisent une relation, un regard, une passion. Pour les Parisiens, les termes de “Turcs, Maures, Orientaux, Arabes, Turcos, Nord-Africains, Kabyles, Maronites, Berbères ! Français musulmans, Maghrébins, Beurs’’ se mêlent pour qualifier ces hommes venus à des époques distinctes du Maghreb, du Moyen Orient, ou d’Égypte. De Même, on les définit souvent par leur appartenance religieuse : “ Mahométans, Musulmans, Chrétiens d’Orient ou Islamistes” ».
Plus tard, avec l’émergence du racisme à leur égard ou à l’occasion d’événements spécifiques, de nouveaux mots font leur apparition : « sidis, chleuhs, melons, bicots, rifains, bougnoules, troncs, ratons, crouilles, salopards, fellaghas, rebeu ou sauvageons”5…Cette histoire met en relation des générations et des destins croisés qui ont fait de Paris une capitale arabe dès le début du XIXe siècle. Entre accueil et rejet, désir et violence, ce récit montre le lien ancien entre la France et l’Orient et le rôle toujours paradoxal qu’elle entend y jouer. C’est à Paris que s’élabore cette fameuse “politique arabe”, qui va de Napoléon Bonaparte à Jacques Chirac en passant par Napoléon III et le général De Gaulle6. Paris a été aussi la capitale d’un empire, dont la conquête de l’Algérie est l’acte fondateur et la “guerre sans nom”, cent trente ans plus tard, la blessure la plus profonde depuis la Seconde Guerre mondiale ». (P.8).
En fait, dès le début du XVIIe siècle, deux maronites du Liban, El-Sahiouni El- Ehdani et Youhanna al Hasrouni qui enseignaient l’arabe au Collège royal de Paris, vont dessiner pour l’Imprimerie nationale les caractères arabes qui permettront après la Révolution, plus précisément en l’an III de la République, à la Convention d’ordonner la traduction en arabe et l’impression de son « Adresse au peuple français ». Dès 1704, les Mille et une nuits, sont traduits en français par Antoine Galland, puis on commencera à s’intéresser aux antiquités égyptiennes, avant l’expédition de Bonaparte (en 1798), et les investigations de Champollion. Des étudiants égyptiens arrivent à Paris en 1826 chaperonnés par Rif’at at- Tahtawi et sont des témoins de la Révolution de juillet 1830, au moment ou commençait la conquête de l’Algérie.
Sous le Second Empire des intellectuels venus d’Orient seront à l’origine des premiers journaux en langue arabe publiés à Paris7. Si avant 1830 des Maghrébins, commerçants ou diplomates (et avant eux des corsaires), avaient pu fouler le sol français généralement pour de brefs séjours, les déplacements vont désormais devenir plus nombreux et de plus longue durée, avec d’abord les déportés dont l’Émir Abdelkader restera le plus célèbre (et aura plus tard à visiter Paris, comme invité de Napoléon III) puis des supplétifs et militaires et enfin avec la déstructuration sociale provoquée par l’entreprise coloniale (qui s’étend à la Tunisie en 1882 et au Maroc en 1912), les vagues d’émigration économique ainsi que d’étudiants (qui s’organisent en 1926 au sein de l’AEMNA)8, notamment en direction de Paris et sa région. Les Parisiens auront par ailleurs l’occasion de scruter des « milliers de figurants arabes » lors des Expositions universelles, telles celles de 1867, 1878, et surtout celle de 1889, ainsi que lors de la commémoration en 1930, du Centenaire de la colonisation de l’Algérie et de l’exposition coloniale de 1931.
L’émigration semble cependant prendre forme à partir de 1894 pour des régions comme la Kabylie (aux côtés des Italiens et des Belges) pour s’étendre à toute l’Afrique du Nord à partir de 1906 et devenir massive à partir de la Première Guerre mondiale. C’est ainsi qu’on comptera en 1918, près de 28 régiments de tirailleurs, spahis et goumiers maghrébins, (173.000 jeunes auront été mobilisés rien qu’en Algérie pour la guerre), ce à quoi il faudra ajouter à partir de 1913 l’appel à une main d’œuvre composée de 160.000 Algériens, 75.000 Marocains et 15.000 Tunisiens. En une dizaine d’année, un demi-million de Maghrébins auraient découvert Paris pour des périodes plus ou moins longues. La politisation au contact des partis de gauche (communiste notamment), et des syndicats, tend à s’étendre ouvrant la voie à l’émergence et l’implantation ici même du nationalisme populaire, surtout après la création de l’Etoile nord-africaine (ENA) en 1926 (année de la guerre du Rif); et, parallèlement aux organisations qui voient le jour au Maghreb depuis le début du siècle (les mouvements « Jeunes » puis libéraux, réformisme musulman et communisme), surtout à partir des années 1930 et notamment dans la conjoncture marquée par l’arrivée au pouvoir en France du Front populaire, mais aussi au contact de l’ébullition suscitée au Moyen Orient par la Nahda et l’effondrement de l’Empire Ottoman, ainsi que la colonisation sioniste en Palestine. D’ailleurs le premier congrès des « Jeunes arabes » (originaires de Syrie-Liban, Palestine, Irak, Égypte), se tiendra en 1913 à Paris même, tandis que les Accords Sykes-Picot de 1916 et l’effondrement de l’Empire ottoman avec les conséquences de la Grande guerre ouvriront la voie aux Mandats de 1920, britannique en Irak, Transjordanie et Palestine, et français en Syrie et au Liban.
Au terme de la Seconde Guerre mondiale, au cours de laquelle 100.000 maghrébins furent mobilisés (5.000 tués et 80.000 faits prisonniers lors de la Débâcle française), la fin des mandats français et les indépendances des deux pays du Levant (en 1943), puis les Evénements du 8 Mai 1945 en Algérie, la déposition du Sultan Mohammed Benyoussef du Maroc (en 1953), l’évolution en Indochine jusqu’à Dien Bien Phu (en 1954), Suez (en 1956), l’évolution en Afrique, la conférence de Bandung (en 1955), et quelque temps avant, les déclenchements des guerres de libération au Maghreb, aboutiront aux indépendances du Maroc et de la Tunisie (en 1956) et de l’Algérie dans les conditions que l’on sait (en 1962).
Les émigrés arabes en France auront participé à toutes ces tranches d’histoire qui déboucheront sur les manifestations tragiques des Algériens organisées en Octobre 1961 à Paris par le FLN. Après les indépendances nationales de leurs pays d’origine une nouvelle période commence pour ces millions d’émigrés, notamment d’origine maghrébine, dont un grand nombre continue à arriver jusqu’en 1975 (arrêt officiel de l’émigration), tandis que des centaines de milliers d’autres sont devenus français avec des jeunes ou « Beurs » issus de la seconde, troisième et même quatrième génération9.
Leurs grands-parents ou parents auront connus les conditions les plus dures de travail dans les mines du Nord ou de Lorraine et à l’usine (Renault et autres), dans les emplois les moins qualifiés, souvent humiliés et vivant dans les bidonvilles (comme celui de Nanterre), à l’instar d’ailleurs des autres émigrés venus d’Afrique et des pays du Sud.
Les plus jeunes pourtant « intégrés » demeurent encore en grand nombre et comme d’autres populations aux revenus modestes, parqués dans les banlieues « à risque » souvent livrés à la délinquance où aux réseaux fondamentalistes qui exploitent leurs misères morales et désarroi identitaire. Ce à quoi il faudra ajouter la précarité de vie des « Sans-papiers » en situation « irrégulière » et chaque jour menacés d’expulsion. Ils constituent tous les boucs - émissaires de la droite xénophobe et de l’extrême droite raciste qui les jettent en pâture à chaque échéance électorale.
Ils sont cependant loin de se laisser traiter comme «les agneaux du sacrifice » ainsi que l’indique leurs réactions parfois maladroites ou manipulées telles les incidents du Stade de France à Saint Denis, lors du match France- Algérie (en octobre 2001) ou de la récente révolte des banlieues (fin 2005), mais aussi des actions beaucoup plus mûries et concertées avec de larges fractions de la population et des associations françaises attachées aux valeurs républicaines : Marche des Beurs pour l’égalité (en 1983), mouvements des « Sans papiers », participation aux actions syndicales….
Par ailleurs l’émigration arabe à Paris n’est plus ce qu’elle était au début du siècle dernier puis qu’entre temps elle s’est adaptée et métissée culturellement et socialement en créant ses propres mouvements et dirigeants associatifs, cherchant y compris les moyens d’institutionnalisation pour un Islam de France (à l’instar des autres grandes religions) et, en activant dans les mouvement de la société civile et politique d’intérêt public et ouverts à tous les citoyens. Plus que jamais dans le passé, elle produit désormais des managers hommes d’affaires et industriels, des personnalités du spectacle, du sport10 et des médias, des universitaires, intellectuels et hommes de lettres appréciés non seulement en France et dans les sociétés d’origine, mais à l’échelle mondiale, parfois traduits dans des dizaines de langues11 et suscitant l’intérêt d’institutions éditoriales et académiques (thèses articles, ouvrages…) et plus que cela, de plus en plus de femmes,....12
Non seulement les émigrations tendent à se transformer en diasporas, mais comme pour les Noirs, Asiatiques et autres, et même s’il reste du chemin à parcourir pour combattre à la fois « la suspicion et le rejet, l’exclusion insidieuse et le contrôle tatillon » d’un côté, et « les replis identitaires de toute nature qui ne favorisent pas le processus d’intégration » de l’autre, et que « le Paris arabe est aussi menacé de connaître des périodes bien sombres » (P.15), tant notamment que le passé colonial n’est pas exorcisé, il y a véritablement et malgré tout, un début d’émergence d’Arabes européens et parisiens. C’est ce que montre aussi sans le claironner le Paris arabe.
D’ailleurs très modestement, les auteurs du livre ne manquent de nous avertir : « Nous assumons les manques, les choix, les oublis13, car ils correspondent à une approche d’auteurs confrontés à leur propre lecture de l’histoire. Le Paris arabe est une variante des Paris arabes possibles. C’est la force et en même temps, la limite d’un tel essai en images ».
De belles images que cinq auteurs soutenus par deux associations l’ACHAC et GENERIQUES ont essayé de nous aider à décrypter !
Mais qu’est-ce qu’un Arabe à Paris ? Les auteurs s’en expliquent longuement, et parmi d’autres nous nous arrêterons sur ce long passage : « Qui se souvient aujourd’hui que cette présence dans la capitale, depuis le début du XIXe siècle est d’une richesse incroyable ? Chaque époque possède pourtant des particularismes forts. Mais aussi des mots et des images qui caractérisent une relation, un regard, une passion. Pour les Parisiens, les termes de “Turcs, Maures, Orientaux, Arabes, Turcos, Nord-Africains, Kabyles, Maronites, Berbères ! Français musulmans, Maghrébins, Beurs’’ se mêlent pour qualifier ces hommes venus à des époques distinctes du Maghreb, du Moyen Orient, ou d’Égypte. De Même, on les définit souvent par leur appartenance religieuse : “ Mahométans, Musulmans, Chrétiens d’Orient ou Islamistes” ».
Plus tard, avec l’émergence du racisme à leur égard ou à l’occasion d’événements spécifiques, de nouveaux mots font leur apparition : « sidis, chleuhs, melons, bicots, rifains, bougnoules, troncs, ratons, crouilles, salopards, fellaghas, rebeu ou sauvageons”5…Cette histoire met en relation des générations et des destins croisés qui ont fait de Paris une capitale arabe dès le début du XIXe siècle. Entre accueil et rejet, désir et violence, ce récit montre le lien ancien entre la France et l’Orient et le rôle toujours paradoxal qu’elle entend y jouer. C’est à Paris que s’élabore cette fameuse “politique arabe”, qui va de Napoléon Bonaparte à Jacques Chirac en passant par Napoléon III et le général De Gaulle6. Paris a été aussi la capitale d’un empire, dont la conquête de l’Algérie est l’acte fondateur et la “guerre sans nom”, cent trente ans plus tard, la blessure la plus profonde depuis la Seconde Guerre mondiale ». (P.8).
En fait, dès le début du XVIIe siècle, deux maronites du Liban, El-Sahiouni El- Ehdani et Youhanna al Hasrouni qui enseignaient l’arabe au Collège royal de Paris, vont dessiner pour l’Imprimerie nationale les caractères arabes qui permettront après la Révolution, plus précisément en l’an III de la République, à la Convention d’ordonner la traduction en arabe et l’impression de son « Adresse au peuple français ». Dès 1704, les Mille et une nuits, sont traduits en français par Antoine Galland, puis on commencera à s’intéresser aux antiquités égyptiennes, avant l’expédition de Bonaparte (en 1798), et les investigations de Champollion. Des étudiants égyptiens arrivent à Paris en 1826 chaperonnés par Rif’at at- Tahtawi et sont des témoins de la Révolution de juillet 1830, au moment ou commençait la conquête de l’Algérie.
Sous le Second Empire des intellectuels venus d’Orient seront à l’origine des premiers journaux en langue arabe publiés à Paris7. Si avant 1830 des Maghrébins, commerçants ou diplomates (et avant eux des corsaires), avaient pu fouler le sol français généralement pour de brefs séjours, les déplacements vont désormais devenir plus nombreux et de plus longue durée, avec d’abord les déportés dont l’Émir Abdelkader restera le plus célèbre (et aura plus tard à visiter Paris, comme invité de Napoléon III) puis des supplétifs et militaires et enfin avec la déstructuration sociale provoquée par l’entreprise coloniale (qui s’étend à la Tunisie en 1882 et au Maroc en 1912), les vagues d’émigration économique ainsi que d’étudiants (qui s’organisent en 1926 au sein de l’AEMNA)8, notamment en direction de Paris et sa région. Les Parisiens auront par ailleurs l’occasion de scruter des « milliers de figurants arabes » lors des Expositions universelles, telles celles de 1867, 1878, et surtout celle de 1889, ainsi que lors de la commémoration en 1930, du Centenaire de la colonisation de l’Algérie et de l’exposition coloniale de 1931.
L’émigration semble cependant prendre forme à partir de 1894 pour des régions comme la Kabylie (aux côtés des Italiens et des Belges) pour s’étendre à toute l’Afrique du Nord à partir de 1906 et devenir massive à partir de la Première Guerre mondiale. C’est ainsi qu’on comptera en 1918, près de 28 régiments de tirailleurs, spahis et goumiers maghrébins, (173.000 jeunes auront été mobilisés rien qu’en Algérie pour la guerre), ce à quoi il faudra ajouter à partir de 1913 l’appel à une main d’œuvre composée de 160.000 Algériens, 75.000 Marocains et 15.000 Tunisiens. En une dizaine d’année, un demi-million de Maghrébins auraient découvert Paris pour des périodes plus ou moins longues. La politisation au contact des partis de gauche (communiste notamment), et des syndicats, tend à s’étendre ouvrant la voie à l’émergence et l’implantation ici même du nationalisme populaire, surtout après la création de l’Etoile nord-africaine (ENA) en 1926 (année de la guerre du Rif); et, parallèlement aux organisations qui voient le jour au Maghreb depuis le début du siècle (les mouvements « Jeunes » puis libéraux, réformisme musulman et communisme), surtout à partir des années 1930 et notamment dans la conjoncture marquée par l’arrivée au pouvoir en France du Front populaire, mais aussi au contact de l’ébullition suscitée au Moyen Orient par la Nahda et l’effondrement de l’Empire Ottoman, ainsi que la colonisation sioniste en Palestine. D’ailleurs le premier congrès des « Jeunes arabes » (originaires de Syrie-Liban, Palestine, Irak, Égypte), se tiendra en 1913 à Paris même, tandis que les Accords Sykes-Picot de 1916 et l’effondrement de l’Empire ottoman avec les conséquences de la Grande guerre ouvriront la voie aux Mandats de 1920, britannique en Irak, Transjordanie et Palestine, et français en Syrie et au Liban.
Au terme de la Seconde Guerre mondiale, au cours de laquelle 100.000 maghrébins furent mobilisés (5.000 tués et 80.000 faits prisonniers lors de la Débâcle française), la fin des mandats français et les indépendances des deux pays du Levant (en 1943), puis les Evénements du 8 Mai 1945 en Algérie, la déposition du Sultan Mohammed Benyoussef du Maroc (en 1953), l’évolution en Indochine jusqu’à Dien Bien Phu (en 1954), Suez (en 1956), l’évolution en Afrique, la conférence de Bandung (en 1955), et quelque temps avant, les déclenchements des guerres de libération au Maghreb, aboutiront aux indépendances du Maroc et de la Tunisie (en 1956) et de l’Algérie dans les conditions que l’on sait (en 1962).
Les émigrés arabes en France auront participé à toutes ces tranches d’histoire qui déboucheront sur les manifestations tragiques des Algériens organisées en Octobre 1961 à Paris par le FLN. Après les indépendances nationales de leurs pays d’origine une nouvelle période commence pour ces millions d’émigrés, notamment d’origine maghrébine, dont un grand nombre continue à arriver jusqu’en 1975 (arrêt officiel de l’émigration), tandis que des centaines de milliers d’autres sont devenus français avec des jeunes ou « Beurs » issus de la seconde, troisième et même quatrième génération9.
Leurs grands-parents ou parents auront connus les conditions les plus dures de travail dans les mines du Nord ou de Lorraine et à l’usine (Renault et autres), dans les emplois les moins qualifiés, souvent humiliés et vivant dans les bidonvilles (comme celui de Nanterre), à l’instar d’ailleurs des autres émigrés venus d’Afrique et des pays du Sud.
Les plus jeunes pourtant « intégrés » demeurent encore en grand nombre et comme d’autres populations aux revenus modestes, parqués dans les banlieues « à risque » souvent livrés à la délinquance où aux réseaux fondamentalistes qui exploitent leurs misères morales et désarroi identitaire. Ce à quoi il faudra ajouter la précarité de vie des « Sans-papiers » en situation « irrégulière » et chaque jour menacés d’expulsion. Ils constituent tous les boucs - émissaires de la droite xénophobe et de l’extrême droite raciste qui les jettent en pâture à chaque échéance électorale.
Ils sont cependant loin de se laisser traiter comme «les agneaux du sacrifice » ainsi que l’indique leurs réactions parfois maladroites ou manipulées telles les incidents du Stade de France à Saint Denis, lors du match France- Algérie (en octobre 2001) ou de la récente révolte des banlieues (fin 2005), mais aussi des actions beaucoup plus mûries et concertées avec de larges fractions de la population et des associations françaises attachées aux valeurs républicaines : Marche des Beurs pour l’égalité (en 1983), mouvements des « Sans papiers », participation aux actions syndicales….
Par ailleurs l’émigration arabe à Paris n’est plus ce qu’elle était au début du siècle dernier puis qu’entre temps elle s’est adaptée et métissée culturellement et socialement en créant ses propres mouvements et dirigeants associatifs, cherchant y compris les moyens d’institutionnalisation pour un Islam de France (à l’instar des autres grandes religions) et, en activant dans les mouvement de la société civile et politique d’intérêt public et ouverts à tous les citoyens. Plus que jamais dans le passé, elle produit désormais des managers hommes d’affaires et industriels, des personnalités du spectacle, du sport10 et des médias, des universitaires, intellectuels et hommes de lettres appréciés non seulement en France et dans les sociétés d’origine, mais à l’échelle mondiale, parfois traduits dans des dizaines de langues11 et suscitant l’intérêt d’institutions éditoriales et académiques (thèses articles, ouvrages…) et plus que cela, de plus en plus de femmes,....12
Non seulement les émigrations tendent à se transformer en diasporas, mais comme pour les Noirs, Asiatiques et autres, et même s’il reste du chemin à parcourir pour combattre à la fois « la suspicion et le rejet, l’exclusion insidieuse et le contrôle tatillon » d’un côté, et « les replis identitaires de toute nature qui ne favorisent pas le processus d’intégration » de l’autre, et que « le Paris arabe est aussi menacé de connaître des périodes bien sombres » (P.15), tant notamment que le passé colonial n’est pas exorcisé, il y a véritablement et malgré tout, un début d’émergence d’Arabes européens et parisiens. C’est ce que montre aussi sans le claironner le Paris arabe.
D’ailleurs très modestement, les auteurs du livre ne manquent de nous avertir : « Nous assumons les manques, les choix, les oublis13, car ils correspondent à une approche d’auteurs confrontés à leur propre lecture de l’histoire. Le Paris arabe est une variante des Paris arabes possibles. C’est la force et en même temps, la limite d’un tel essai en images ».
De belles images que cinq auteurs soutenus par deux associations l’ACHAC et GENERIQUES ont essayé de nous aider à décrypter !
notes
* On pourra remonter au moins jusqu’à l’Esprit des lois de Montesquieu et Bug-Jargal de Victor Hugo, pour ne retenir que les auteurs les plus connus.
1 L’esclavage n’est définitivement aboli enFrance qu’en mars 1848. Pour une information fouillée sur les débats suscités en France sur les questions de l’esclavage et de la colonisation et leur histoire, cf : Gilles Manceron, Marianne et les colonies. Une introduction à l’histoire coloniale de la France. Paris, Ed. La découverte 2003.
2 À partir de 2000, les « Arts premiers » jusqulà cantonnés au Musée des Arts africains et océaniens (ancien Musée des colonies) font leur entrée au Musée du Louvre
3 Avec les prix littéraires décernés au Martiniquais Patrice Chamoiseau (le Goncourt en 1992), le Grand prix de l’Académie française en 1996 à la Camerounaise Calixte Beyala, et en 2000 le prix Renaudot à Ahmadou Kourouma originaire de Côte d’Ivoire. Des créateurs et mannequins s’affirment aussi dans la haute couture.
4 Joséphine Baker chantait dans les années 1930 « J’ai deux amours, ma savane et Paris »
5 Le terme “racaille” est venu s’ajouter à cette liste après les émeutes des banlieues de l’automne 2005.
6 On pourra se référer à ce propos à l’ouvrage de Jacques Frémaux, La France et l’Islam depuis 1789, Paris, Ed. Hachette 1989.
7 Paris deviendra d’ailleurs par la suite une plaque tournante et lieu de refuge pour les opposants venus de différentes régions du Monde arabe, fonction que la ville continue à assurer.
8 Association des étudiants musulmans nord-africains.
9 Pour ce qui est de l’accès à la nationalité française, cf. Patrick Weil, Qu’est-ce qu’être Français ? Histoire de la nationalité française depuis la Révolution ; Paris, Ed. Grasset, 2002.
10 Dans le domaine du spectacle ou ne citera ici que les vedettes les plus médiatisées comme les comédiens Smaïn (d’origine algérienne) ou Djamel Debouze (d’origine marocaine), les chanteurs de l’exil arabophones ou berbérophones ancrés depuis longtemps, et les nouvelles «vedettes » portés par des rythmes comme le Raï ou le Rap. Ils sont très nombreux aussi à avoir émergé par le sport avec bien sur en tête «le phénomène » Zidane pour le foot-ball.
11 On ne compte plus le nombre de prix littéraires délivrés en France à des écrivains d’origine arabe : Tahar Bendjelloun (d’origine marocaine), Amine Malouf (d’origine libanaise), Mohammed Dib et Assia Djebbar (Algériens dont les noms avaient été cités pour des prix Nobel)…
12 D’ailleurs les nouveaux émigrants qui arrivent de manière légale ou illégale sont de niveau scolaire et universitaire plus élevé, et comprennent plus de femmes que lors des vagues précédentes.
13 Ce à quoi il faudra ajouter quelques erreurs qui ont pu se glisser dans ce livre, par exemple «les indépendantistes de l’Etoile Nord-africaine » n’ont pas participé au Congrès musulman algérien tenu en Juin 1936 à Alger (voir p.12). De même le nombre de visiteurs de l’Exposition coloniale de Paris en 1931, (33 M) annoncé dans le Paris arabe (p 13), ne correspond à celui donné dans le Paris noir (P 70) écrit par les mêmes auteurs (8 million de visiteurs dont 4 million provenant de la Région parisienne). Même sur le plan de l’iconographie quelques vérifications ou précisons seraient peut être nécessaires. Ainsi la photographie (P. 48) ayant pour légende « Mission marocaine en France » (1909, donc avant le protectorat de 1912) ne représente que trois personnalités françaises (dont deux officiers) et Si Kaddour Benghabrit, Algérien installé depuis quelques années seulement au Maroc. Ceci n’empêche pas la richesse de ces deux beaux ouvrages qui mettent à la disposition du lecteur une quantité impressionnante d’informations chiffrées ou non et une iconographie originale.
1 L’esclavage n’est définitivement aboli enFrance qu’en mars 1848. Pour une information fouillée sur les débats suscités en France sur les questions de l’esclavage et de la colonisation et leur histoire, cf : Gilles Manceron, Marianne et les colonies. Une introduction à l’histoire coloniale de la France. Paris, Ed. La découverte 2003.
2 À partir de 2000, les « Arts premiers » jusqulà cantonnés au Musée des Arts africains et océaniens (ancien Musée des colonies) font leur entrée au Musée du Louvre
3 Avec les prix littéraires décernés au Martiniquais Patrice Chamoiseau (le Goncourt en 1992), le Grand prix de l’Académie française en 1996 à la Camerounaise Calixte Beyala, et en 2000 le prix Renaudot à Ahmadou Kourouma originaire de Côte d’Ivoire. Des créateurs et mannequins s’affirment aussi dans la haute couture.
4 Joséphine Baker chantait dans les années 1930 « J’ai deux amours, ma savane et Paris »
5 Le terme “racaille” est venu s’ajouter à cette liste après les émeutes des banlieues de l’automne 2005.
6 On pourra se référer à ce propos à l’ouvrage de Jacques Frémaux, La France et l’Islam depuis 1789, Paris, Ed. Hachette 1989.
7 Paris deviendra d’ailleurs par la suite une plaque tournante et lieu de refuge pour les opposants venus de différentes régions du Monde arabe, fonction que la ville continue à assurer.
8 Association des étudiants musulmans nord-africains.
9 Pour ce qui est de l’accès à la nationalité française, cf. Patrick Weil, Qu’est-ce qu’être Français ? Histoire de la nationalité française depuis la Révolution ; Paris, Ed. Grasset, 2002.
10 Dans le domaine du spectacle ou ne citera ici que les vedettes les plus médiatisées comme les comédiens Smaïn (d’origine algérienne) ou Djamel Debouze (d’origine marocaine), les chanteurs de l’exil arabophones ou berbérophones ancrés depuis longtemps, et les nouvelles «vedettes » portés par des rythmes comme le Raï ou le Rap. Ils sont très nombreux aussi à avoir émergé par le sport avec bien sur en tête «le phénomène » Zidane pour le foot-ball.
11 On ne compte plus le nombre de prix littéraires délivrés en France à des écrivains d’origine arabe : Tahar Bendjelloun (d’origine marocaine), Amine Malouf (d’origine libanaise), Mohammed Dib et Assia Djebbar (Algériens dont les noms avaient été cités pour des prix Nobel)…
12 D’ailleurs les nouveaux émigrants qui arrivent de manière légale ou illégale sont de niveau scolaire et universitaire plus élevé, et comprennent plus de femmes que lors des vagues précédentes.
13 Ce à quoi il faudra ajouter quelques erreurs qui ont pu se glisser dans ce livre, par exemple «les indépendantistes de l’Etoile Nord-africaine » n’ont pas participé au Congrès musulman algérien tenu en Juin 1936 à Alger (voir p.12). De même le nombre de visiteurs de l’Exposition coloniale de Paris en 1931, (33 M) annoncé dans le Paris arabe (p 13), ne correspond à celui donné dans le Paris noir (P 70) écrit par les mêmes auteurs (8 million de visiteurs dont 4 million provenant de la Région parisienne). Même sur le plan de l’iconographie quelques vérifications ou précisons seraient peut être nécessaires. Ainsi la photographie (P. 48) ayant pour légende « Mission marocaine en France » (1909, donc avant le protectorat de 1912) ne représente que trois personnalités françaises (dont deux officiers) et Si Kaddour Benghabrit, Algérien installé depuis quelques années seulement au Maroc. Ceci n’empêche pas la richesse de ces deux beaux ouvrages qui mettent à la disposition du lecteur une quantité impressionnante d’informations chiffrées ou non et une iconographie originale.
Auteur
Hassan REMAOUN
Pagination
Pages 13-15